Jusqu’à l’âge de 7 ans un enfant au Brésil est laissé à la charge de sa municipalité. Bien souvent, dans les régions les plus pauvres, les municipalités n’ont pas les moyens (ou ne se donnent malheureusement pas toujours les moyens) d’ouvrir des écoles de pré-scolarisation. Nous ne pouvons pas laisser les enfants sans savoir lire et écrire, indépendamment des conditions de vie de chacun d’entre eux...

L’Association Santa Vitória a créé une école pré-infantil dans le grand village de Santa Vitória, dans l’Etat du Maranhão au Brésil, à quatre heures d’une route tortueuse de la première ville. Pendant les cinq mois de période des pluies, la route est impraticable et laisse difficilement passer quelconque moyens de transport. A Santa Vitória il n’y a pas de médecin.

Les enfants apprennent en priorité à lire et à écrire. Le respect de l’autre, l’éveil moteur ou encore l’hygiène sont des éléments tout autant appliqués dans l’école. Notre travail est aussi de renforcer le lien social à travers la santé. Les enfants sont pris en charge en cas d’urgence et les familles sont suivies pour des conseils santé ou en ce qui concerne les différentes formes de prévention.

2.4.09

Sans eau

Francisquin est connu de tous à Santa Vitória. Il est indispensable et précieux. Il est toujours au centre de vives discussions ; un jour on le blâme, le lendemain on l’adore.

Francisquin est ‘l’élu’, chargé d’approvisionner l’eau dans les foyers du grand village.
Cela fait maintenant presque 20 ans qu’il travaille les deux pieds dans l’eau!

Ce n’est qu’en 1990 qu’un puits a enfin été creusé à Santa Vitória afin d’alimenter les maisons.

En fait, jusqu’en 1984, les habitants venaient recueillir, un saut à la main, l’eau du fleuve. Une fois à la maison, ils vidaient l’eau dans de petites jarres et filtraient l’eau à l’aide d’un linge.

Puis en 1984, padre Ambrogio, un missionnaire capucin indépendant (celui à qui notre école est dédiée), personnage au caractère bien..trempé, décide de fabriquer et d’organiser un premier réseau hydrolique à Santa Vitória!
Il construit deux puits dans le village et installe une pompe à l’ancienne, dans le fleuve. Une vieille pompe de l’époque qui marchait avec le courant.
Avantages :
- les villageois se servaient directement aux puits.
- Cela permettait à padre Ambrogio d’irriguer ses cultures dans un terrain qu’il avait acheté près du fleuve !

Francisquin se souvient bien de son premier jour de travail, le 21 février 1990.
Les travaux venaient de se terminer, un nouveau puits avait été creusé et toutes les maisons de Santa Vitória y étaient désormais reliées. Une pompe efficace avait été placée près du puits, permettant la répartition dans les tuyaux.
Francisquin avait participé aux travaux et on lui a proposé de continuer à travailler. Et il s’est mouillé !

La pompe n’étant pas sufisamment puissante, Santa Vitória est coupée en deux : un jour l’eau est distribuée dans la partie Ouest du village, et le jour suivant uniquement dans la partie Est. Aujourd’hui Santa Vitória compte 400 foyers.

Francisquin a toujours été exploité par la mairie de Barra do Corda. Je me souviens qu’il n’y a encore pas si longtemps il demandait 2 reais par maison à Santa pour gagner sa vie. Il n’a vraiment commencé à gagner de l’argent, le salaire minimum brésilien, qu’à partir de 2004!
Il a pourtant de grandes responsabilités ; il s’occupe non seulement de la distribution de l’eau dans les maisons, mais aussi de la manutention générale, à l’achat du matériel. Il ne peut pas voyager. Personne au village ne connait mieux que lui le fonctionnement de cette oeuvre !

Justement.
La pompe de Santa Vitória ne fonctionne plus.
Depuis quelques jours déjà, elle montrait quelques signes de faiblesse. Francisquin était à Barra do Corda pour essayer de trouver quelqu’un à la Mairie qui veuille bien l’écouter. Nous étions alors dans une période très festive au Brésil et aucun responsable ne semblait prêter attention à ses requêtes.
Francisquin me raconte que le problème ne venait pas de la pompe elle-même, mais de la clef de la pompe (j’éviterai les discours techniques) :
« Un homme sans scrupules et se croyant plus intelligent que les autres, a voulu réparer la pompe en mon absence. Il a inventé une histoire et a réussi à se faire donner la clé de la maisonette qui protège la pompe », raconte Francisquin.
Il continue : « Lorsque cet homme a allumé la pompe, il l’a fait en alimentant le village tout entier au lieu de sa moitié. La pompe n’a pas supporté très longtemps, et tout a pris feu ».

Aujourd’hui, Santa Vitória est sans eau de puits. Les habitants ont repris l’habitude de se baigner au fleuve et d’aller chercher l’eau de ce même fleuve pour la boire.
Comme à l’époque ? A un détail près..De nos jours, le fleuve est bien plus pollué qu’à l’époque.

Une nouvelle pompe, dont le prix est d’environ 5000 reais (soit 2000 euros), devrait bientôt arriver..Lorsque la fête en ville sera finie.


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